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Mémoire de microscope

Les dix paroles du fond du passé, Dix Commandements pour une Vie paisible
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QUAND LE CHAT EST PARTI...

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Installée devant la flamme au ronronnement imperturbable, Joséphine est entourée de nombreuses piles de boîtes qu'elle manipule méthodiquement, avec aisance, apparemment sans se presser. Pourtant, elle se dépêche. Il y a beaucoup de travail, toujours plus. Les journées sont longues, sans supplément de salaire pour la technicienne qui réclame de l'aide à grands cris. La tête blonde approuve de la tête, sans donner suite à ses revendications. Pourtant, la nouvelle machine avale énormément de sérums et de réactifs divers. Elle crache à longueur de journée une quantité impressionnante de résultats. Tout cela n'occupe même pas une personne à temps plein. Le travail augmente également dans les autres secteurs, alors qui pourrait aider en bactério ? Quand les syndicalistes ont demandé de l'embauche au directeur, celui-ci leur a ri au nez en les traitant de doux rêveurs. Jean en avait les oreilles décollées d'embarras et Joséphine était rouge de fureur. Les bénéfices du laboratoire sont affectés à d'autres secteurs de l'hôpital. Il n'y a pas d'argent.

Le lendemain de ce branle-bas, vers dix heures, par un pur effet du hasard, notre laborantine se retrouve à l'office seule avec le chef. Ils boivent une tasse de café. Il a l'air ennuyé. Il parle de la pluie et du beau temps.

Est-ce la pluie hivernale qui lui plisse le front ?

D'accord, le printemps se fait attendre une fois encore. Joséphine lui raconte les scarlatines de l'année dernière. Il hoche la tête en écoutant le récit, reconnaît l'importance de la qualité des milieux de culture, mais ses yeux sont ailleurs, loin dans la brume. A-t-il seulement entendu ? Au moins, aujourd'hui, il ne va pas essayer de convaincre Joséphine d'acheter ses milieux au moins cher. Elle tente de s'esquiver :

- Vous paraissez tracassé. Je ne vais pas vous importuner d'avantage.

- Non, non, vous ne me dérangez pas. Je suis inquiet à propos d'Irénée.

- Irénée ! Pourquoi ?

- Il n'y a pratiquement plus de verrerie à laver. Je ne sais pas comment l'occuper.

- Elle se débrouille très bien avec les pipis.

- C'est insuffisant pour combler une journée. Si on ne lui trouve pas de travail, il faudra la recycler à la cuisine de l'hôpital. La direction ne veut plus entendre parler d'un poste de laverie.

- A la cuisine ! Elle travaille avec nous depuis plus de dix ans. De plus elle est très soigneuse et consciencieuse. Lui trouver du travail ! J'en ai à distribuer, moi du travail ! Juste ce qu'il lui faut, même.

Le chef a gagné. Il écarquille les yeux et tapote la tasse qu'il tient en mains. Joséphine continue :

- Elle pourrait prendre en charge les mises en cultures. Il suffirait de déménager le poste pipis en bactério. Cela permettrait d'ailleurs de réduire les manipulations des urines en effectuant d'un seul coup le sédiment et l'ensemencement. Une telle organisation ferait gagner du temps.

- Vous croyez qu'elle sera capable de travailler en bactério ?

- Bien sûr ! Je lui apprendrai petit à petit.

- Sera-t-elle d'accord ?

- Elle aura probablement peur de ne pas être à la hauteur. Je vais lui parler. J'ai confiance. Elle l'aura aussi.

- Fort bien ! Organisez cela comme vous l'entendez.

- Comptez sur moi.

Joséphine n'en peut plus de contentement. Enfin, elle va pouvoir travailler en équipe. Et avec Irénée ! Elle la formera depuis le début, lui apprendra l'abc de la bactériologie, la formera selon ses propres désirs de maniaque. Ce sera fatigant. Cela prendra du temps, mais quelle importance ? Vite, expliquer la chose à Irénée, en douceur pour ne pas l'effrayer.

 

La réaction d'Irénée est larmoyante :

- Je ne saurai pas. Je ne suis pas capable.

Les larmes coulent à plein flot :

- Laisse-les m'envoyer à la cuisine. Tant pis.

Joséphine tente d'arrêter le déluge :

- Je ne veux pas que tu sois transférée à la cuisine. J'ai besoin de toi.

- Je ferai des erreurs, c'est toi qui auras les ennuis.

- Je suis persuadée que tu travailleras très bien.

- Je n'ai pas de diplôme !

- Et alors ? Je vais t'apprendre les manipulations depuis le début, comme pour une stagiaire. Tu verras, ça te plaira. Je suis absolument persuadée que tout ira pour le mieux. Nous ferons une équipe parfaite.

Un petit soleil pâle, celui d'après la pluie, illumine le visage mouillé d'Irénée, mais les protestations continue :

- Tu dis cela pour qu'on ne m'envoie pas à la cuisine.

- Pas du tout ! Je le dis parce que je sais que tu es capable d'effectuer ce travail. Tu es soigneuse et consciencieuse. Tu le feras mieux qu'une laborantine qui trouverait cela ennuyeux à la longue. Tu le feras mieux parce que tu ne voudras pas te tromper. Pour toi, tout sera toujours très important et ça, c'est la clef de la bactériologie : le moindre geste est essentiel, le plus petit détail contribue à la réussite de l'analyse. Tu as l'intuition qu'il faut, ainsi que beaucoup de dextérité.

Le soleil perce les nuages, un rictus des joues empourprées précède deux grosses larmes qui coulent jusqu'au menton. D'un revers de mains, Irénée les essuie en disant :

- Si ça ne va pas, tu m'en voudras.

- Absolument pas ! C'est une idée à moi. C'est donc à moi d'en assumer les conséquences. Tu auras la vie dure. Je ne t'épargnerai aucune remarque. Je sais que ça n'arrivera pas, mais si tu cochonnes le travail, je t'enverrai à la cuisine, car, tu le sais, pour moi, la qualité des analyses compte avant tout. C'est d'ailleurs pour cela que ça me conviendrait bien que tu travaille avec moi. La seule question qui doit déterminer ton choix est la suivante : Penses-tu que ce travail te plaira ?

- Oh oui !

- Parfait ! Demain nous déménagerons les pipis. Tu t'installeras en bactério. Désormais, tu ne t'occupes plus de la vaisselle du laboratoire. Le poste est supprimé par les hautes autorités. J'en suis ravie ! Il y longtemps que j'avais imaginé que tu pourrais travailler avec moi.

- Tu n'as jamais rien dit !

- Je pensais que ça resterait lettre morte. Je me disais qu'il suffisait que je le propose pour que le chef s'y oppose.

- Tu crois qu'il agirait ainsi ?

- Je lui ai tenu tête. Il aurait voulu réduire les coûts au détriment de la qualité. J'ai tellement bien argumenté qu'il n'est plus venu tourner autour de mes boîtes. Tu penses bien qu'il m'en veut. Il n'a pas main mise sur le secteur. Il ne le supporte pas.

- Pourquoi t'a-t-il donné carte blanche alors ?

- Sois sûre qu'il s'amuserait si ça ne marchait pas. Il pense probablement que nous ne nous entendrons pas.

- C'est un fait qu'il n'a de la considération que pour les gens diplômés. Le vieux patron n'était pas ainsi, lui.

- Parce qu'il savait apprécier chacun à sa juste valeur, d'après le travail fourni. Il ne flattait jamais. Il marquait sa considération en confiant une responsabilité.

- Je me souviens comme j'étais fière quand il m'a confié le poste des pipis !

- Tu te serais pliée en quatre pour faire un travail que beaucoup considèrent comme une corvée.

- Maintenant que je suis en bactério, je vais devoir me plier en huit !

Elles rient toutes les deux de bon cœur.

 

Les chimistes apprennent la nouvelle avec étonnement. Ils sont persuadés que c'est là le début de la fin d'une amitié. Ils pensent que Joséphine est trop maniaque et Irénée trop peu appliquée. Que font-ils de la motivation ? De la valorisation par le travail ?

Le long apprentissage commence le jour même par un inventaire commenté des milieux de culture. Les cultures de bactéries, c'est comme l'élevage des animaux. Dans les deux cas, il est préférable de connaître la composition des aliments.

Irénée est partie. Joséphine s'attarde sur une souche merdique. Il s'agit encore d'un Gram négatif de petite taille. Il n'a pas les caractéristiques d'une pasteurella classique. Pourtant, une fois de plus, il en semble proche. Il a été isolé d'un abcès de la bouche. Elle téléphone l'antibiogramme au médecin traitant, le docteur Franck et lui explique les difficultés d'identification. La réponse du praticien se veut plaisante et compréhensive :

- Pas étonnant que ce soit une cochonnerie, le gars n'est pas très propre !

- Ah, Docteur ! Si seulement il me suffisait d'eau de savon pour résoudre le problème de l'identification !

La technicienne décide de s'en référer au chef. Il est dans son bureau. Elle frappe à la porte :

- Entrez.

- Excusez-moi de vous déranger. J'ai une souche à problème pour le docteur Franck.

Elle lui fait part des caractères contradictoires et inhabituels du germe.

Sans vergogne, le chef résout le problème d'un coup de cuillère à pot :

- Envoyez-la au laboratoire universitaire de ***.

- C'est ce que je comptais faire, mais je pensais que vous auriez peut-être des conseils techniques à me donner afin de terminer l'identification ici, car chez *** ça prend du temps. Nous n'avons pas encore reçu l'identification du même genre de souche que j'avais envoyé fin de l'année dernière.

- Ah oui ! J'ai oublié de vous signaler qu'ils m'ont téléphoné à ce sujet. Ils ont envoyé la souche au Danemark. Il y a là-bas un spécialiste qui étudie ce genre de bactérie. Il prépare une publication à ce sujet. J'ai dû leur communiquer des renseignements complémentaires sur le contexte clinique et épidémiologique. Il s'agit bien d'une pasteurella, mais d'un genre très particulier. L'identification est toujours en cours.

- Depuis quatre mois ?

- Du moins, elle l'était encore quand ils m'ont téléphoné, cela fait déjà un bon moment.

- Je vous remercie de m'avoir tenue au courant ! Je vais donc leur envoyer celle-ci également.

Le chef est plongé sur une feuille de papier qui semble l'absorber. Sans bouger la tête, il lève des yeux agressifs vers la laborantine. Celle-ci comprend que l'entretien est fini, qu'on la met dehors. Elle sort du bureau et retourne derrière sa porte, dans son local accueillant. "Quel malheur tout de même, pense-t-elle. Je m'esquinte à isoler une souche délicate, tellement rare, au point qu'il faut l'envoyer à un spécialiste étranger, elle va paraître dans une publication, à quel titre, je n'en sais rien et on ne me tient même pas au courant !"

Joséphine ressent de l'injustice, mais intérieurement, elle est très fière d'elle-même et estime que l'attitude du chef le dévalorise. Elle va d'ailleurs conter la chose à Jean qui, songeur, prend son temps avant de répondre :

- Il aurait pu de le dire tout de suite... La souche a été isolée avant son arrivée... Je ne le croyais pas capable de ce genre de mesquinerie.

- En ce qui me concerne, plus rien ne m'étonne de sa part.

Jean se perd dans de profondes réflexions. Son regard lointain exprime la crainte de parler, mais la déception qu'il ressent à l'égard du chef est plus forte :

- Il est parfois bizarre. Il a de bons côtés. Par contre... Il va beaucoup trop vite. On ne vérifie plus les nouvelles techniques avant de les adopter. Auparavant, cela traînait un peu trop. Le pharmacien n'arrivait jamais à donner le feu vert... Maintenant, c'est dangereux.

- Les médecins ne rouspètent pas ?

- Dimanche dernier, j'ai rencontré Aldo au stade. Il m'a demandé "Qu'est-ce qui se passe au laboratoire ?" Il m'a parlé des glycémies qui sont trop basses. Je lui ai expliqué que les normes ne sont plus les mêmes avec la nouvelle machine. Il est très fâché de ne pas avoir été averti.

- C'est un manque de sérieux !

Françoise vient d'entrer. Elle intervient :

- Vous parler des méthodes du chef ?

- à ton avis ?

- Justement, Fifi me quitte à l'instant. Elle est rouge de colère. Elle n'a plus confiance en aucun résultat. Elle veut que je contrôle toute la coagulation. Il faut d'abord que je refasse les courbes. Il y a bien un mois que cela n'a plus été mis à jour. Certains feraient mieux de faire preuve d'un peu plus de rigueur au lieu de dépenser leur énergie à frotter la manche du chef.

Elle s'adresse à Jean :

- Si tu as un peu de temps, pourrais-tu me reprendre les lipides et les acides gras ?

Il accepte, même s'il ne paraît pas heureux de la perspective.

Françoise sort. Fifi entre. Joséphine s'amuse. Effectivement, la biologiste est rouge de colère. Elle s'adresse à Jean sèchement en lui montrant un protocole :

- Regardez : ça ne va pas, ça ! Et ça ?

Elle barre énergiquement les résultats sur la belle feuille de papier.

Joséphine s'en va sur la pointe des pieds. Histoire de mesurer la température, elle va saluer le pharmacien :

- Comment allez-vous, Monsieur ? On dirait qu'il y a de l'électricité dans l'air, aujourd'hui.

Il pince la bouche et dit :

- C'est inadmissible ! Je ne peux avoir aucune confiance en ce que je dois signer. Regardez ici : voici un cholestérol à 435. Hier, pour la même personne, il était à 220. Une telle variation est impossible en si peu de temps.

- Que dit le chef de tout cela ?

- Il vient de partir. Il ne reviendra pas aujourd'hui. Mais regardez donc ceci !

Il barre et barre encore des résultats sur le beau papier des protocoles.

- ça ne peut plus continuer ainsi !

Il se lève et se dirige vers la chimie.

Joséphine s'amuse. Le chat est parti, les souris se révoltent. Belle journée ! Elle se frotte les mains et va se promener du côté du secrétariat. Elle n'y trouve qu'une secrétaire, elle aussi très en colère et qui explose à la vue de Joséphine :

- Tu te rends compte ! Je suis toute seule ! Il a donné congé aux autres. Il s'en fout : Il n'est pas là. Et Fifi qui râle ! Elle tape du pied en disant : "ça ne va pas... ! ça ne va pas... !" Qu'est-ce que j'y peux, moi ? Qu'elle s'adresse à qui de droit !

- Ne n'énerve pas, tu n'y peux rien justement.

- Tu avais raison quand tu disais qu'il nous mènerait à la catastrophe.

- Il fait des changements sans rien vérifier. Si c'est ça l'avenir, on est mal parti. Mais que pouvons-nous faire ?

- En tout cas, toi, en bactério, il te laisse tranquille.

- Que tu crois ! Je dois beaucoup lui résister.

- Si les chimistes faisaient comme toi, il finirait bien par se calmer.

- Tu sais, les chimistes, ils ont peur de perdre leur place. C'est dur de lui tenir tête !

- Heureusement qu'il y en a au moins une qui le fait. Le docteur Mirande disait encore à Monique ce matin : "Tout va de travers chez vous, il n'y a que la bactério de correcte."

- J'en suis flattée ! Les médecins devraient protester et pas aux secrétaires qui n'en peuvent rien. En tant que clients, ils ont du poids dans la nouvelle logique commerciale du laboratoire.

- Pourquoi ne s'attaquent-ils pas directement et fermement au chef ?

- Du temps du grand chef blanc, je pensais que c'était dû à sa position au sein du Conseil de l'ordre, mais maintenant, je ne comprends pas très bien ce qui les empêchent de peser de tout leur poids. Peut-être craignent-ils de se faire des ennemis parmi leurs confrères qui pourraient les descendre en cas d'erreur de leur part ? Personne n'est à l'abri d'une erreur. En médecine, l'erreur peut-être fatale. Est-ce cela qui leur fait peur ?

 

Joséphine se décide enfin à se remettre au travail. En chemin, elle rencontre monsieur Benjamin, un sympathique délégué. Elle l'accueille avec ravissement :

- Bonjour, cher monsieur ! Quelle surprise de vous voir ! Il y a longtemps que je n'ai pas eu ce plaisir.

Il lui tend chaleureusement la main et lui dit avec un large sourire :

- Je le regrette, croyez-le, mais ce n'est pas de ma faute. Je profite de l'absence de votre chef pour venir m'entretenir avec vous. Quand il est là, ce n'est pas possible.

- Il est donc si terrible que cela ?

- Il ne me fait pas peur, mais il est le chef ! Il y a environ deux mois, je me dirigeais vers votre local comme d'habitude. Un grand blond m'a arrêté d'un air autoritaire : " Eh ! Monsieur, où allez-vous ? " Tout étonné, je lui ai répondu : "En bactério, voir la technicienne." Cela n'a pas eu l'air de lui plaire : "Dorénavant, c'est à moi que vous devrez vous adresser." Je ne lui ai pas caché mon étonnement : "Excusez-moi, je ne vous connais pas !" Il s'est présenté : "Docteur Coupdevent, Biologiste en chef." C'était sans appel. Je me suis confondu en excuses et je me suis empressé de me présenter à mon tour. Il me pria de l'attendre dans la salle d'attente. Vingt minutes plus tard, il me recevait très cordialement. Je lui ai parlé de l'étude à laquelle vous avez participé, ainsi que de ses conclusions. Il n'avait pas l'air très intéressé. Je lui ai demandé si c'était possible de vous rencontrer à propos de cette étude. Il m'a répondu que ce n'était pas nécessaire, vu qu'il reprenait en main le service de bactériologie.

- Je vous remercie de me dire tout cela. Je m'étonnais de ne plus voir personne. Je comprends maintenant.

- il a installé une véritable barrière...

- La barrière oto-rhino-pharyngée du laboratoire ! Vous êtes tous des microbes. Si vous la passez, vous risquez de provoquer une méningite au cerveau que je suis. J'en suis flattée !

- On peut dire que vous avez le moral !

- Non, au contraire, je suis découragée. Ce monsieur considère qu'il "reprend le service en main", alors qu'il ne peut répondre à aucune de mes questions. Tout ce qu'il sait dire, c'est : "envoyez la souche au laboratoire de ***" ou "cela est sans signification". Il ne connaît même pas la plupart des techniques utilisées. Il est incapable de me donner le moindre conseil valable. Comment vais-je faire pour me tenir à niveau, s'il ne laisse plus venir les délégués. Ces derniers jouent un grand rôle dans la mise à jour de mes connaissances. Je n'ai pas le temps de courir à toutes les conférences. Discuter galamment avec un délégué va beaucoup plus vite et c'est très agréable. De plus, le travail de laboratoire manque de contacts humains. Vos visites sont de véritables séances de cours récréatifs. Sans vous et vos collègues, je ne pourrai pas suivre le progrès. Le service va rétrograder.

- Ne vous démoralisez pas. Cette situation ne durera pas. Je pense que tous sont comme moi et qu'ils préfèrent vous voir plutôt, vous plutôt que votre chef. Vous savez, entre représentants, nous ne sommes pas que des concurrents. Nous parlons souvent dans les salles d'attente. En ce moment, votre blond souverain occupe beaucoup de conversations. Peu de mes collègues l'aiment, du moins ceux qui vendent de la qualité. Il s'intéresse plus au prix qu'à l'argumentation technique ou médicale.

- Hélas ! Mais je ne permettrai jamais qu'il m'impose un produit qui ne convient pas sous prétexte qu'il est moins cher. S'il y tient, il pourra toujours me mettre dehors, mais je ne céderai pas sur ce point, jamais.

- Je ne pense pas qu'il soit bête. Il ne vous licenciera pas. Il est certainement conscient de la qualité de votre travail.

- Justement ! Veut-il de la qualité ou seulement de la rentabilité ?

- Ne vous inquiétez pas. Une diminution de qualité en bactério nuirait à la réputation générale du laboratoire. Vous pouvez me croire qu'il en est conscient.

- Espérons-le.

Joséphine soupire et poursuit :

- Tout ceci dit, parlons un peu de choses sérieuses. Profitons de votre passage en cette zone interdite pour nous instruire : Quoi de neuf ?

Monsieur Benjamin sourit. Il est content de ce qu'il a à annoncer.

- Une nouvelle céphalosporine.

- ça alors ! Je vous écoute.

Le délégué explique longuement les caractéristiques du nouvel antibiotique. Il répète tout ce qu'il avait déjà dit à Coupdevent. La laborantine le harcèle de questions pertinentes et parfois délicates, mais l'homme connaît son sujet. Il n'est pas comme certains de ses collègues qui vendent pour vendre, sans vraiment savoir. Ils disent n'importe quoi. Leurs paroles sont du vent qui remue la poussière de l'ignorance. Joséphine ne perd pas de temps avec ceux-là. Un jour, un jeune nouveau présentait un nouvel antiseptique urinaire comme le meilleur du marché. Sommé de prouver que c'était le meilleur, il répondit : "Absolument ! C'est le meilleur, c'est écrit, regardez." Joséphine rigola un bon coup et lui expliqua que le papier se laisse écrire. Néanmoins, le jeune homme avait de la chance, car l'antiseptique était vraiment très bon, le meilleur ! Il fit un tabac, si on peut dire.

La conversation technique navigue toutes voiles dehors sur l'océan microbien. Au bout d'une demi-heure, les deux complices se saluent. Monsieur Benjamin promet de revenir.

Si leur relation n'était pas strictement professionnelle, on pourrait dire qu'ils sont amis, ces deux-là. D'ailleurs, la communion de deux personnes de même métier est aussi agréable que l'amitié. La relation est simplement limitée à l'espace professionnel. Pour en arriver à cette forme d'amitié, il faut être sincère, mettre bas l'hypocrisie, la jalousie et l'orgueil, tous ces sentiments qui empoissonnent habituellement les relations de travail. Les contacts prennent alors une allure authentique et agréable. Il n'est pas toujours indiqué de les étendre à la vie privée, car à ce niveau, les sujets d'entente, de symbioses peuvent diverger et lien éclater. Quoi qu'il en soit, au travail, comme dans n'importe quelle situation, seul le respect mutuel peut maintenir une relation amicale.

 

L'heure de la tasse est arrivée. Joséphine raconte aux chimistes son entretien avec le sympathique monsieur Benjamin.

Françoise, à propos du chef :

- Il va finir par faire rire de lui.

Jean :

- Vous allez dire que je passe ma vie sur les stades, mais toujours au football, j'ai rencontré le délégué de...

Il se gratte les cheveux en disant :

- Je n'arrive plus à trouver le nom de la firme.

Il s'adresse à Joséphine :

- Tu sais, celui qui habite dans mon village.

- Ah oui ! Monsieur Boulard de la firme Axphar.

Notre Jean s'illumine :

- C'est ça ! Il m'a raconté à peu près la même chose. Il m'a dit : "Impossible de rentrer au labo. J'avais l'habitude d'aller voir ta collègue de la bactério, mais ton chef m'en a empêché."

Un peu embarrassé, légèrement rougissant, Jean continue tout de même :

- Il a ajouté que tu connais ton métier, qu'il n'est pas question de te raconter n'importe quoi.

Pas peu fière, Joséphine se joue du chimiste :

- Bien entendu, tu en as profité pour lui expliqué mon difficile caractère, je suppose ?

Imitant les enfants pris en flagrant délit, Jean rentre la tête dans les épaules et paraît plus gêné que ce qu'il est en réalité :

- Bêh, c'est à dire...

Faisant mine de se racheter, il ajoute promptement :

- Il m'a dit qu'il s'entend très bien avec toi.

Joséphine, d'un air de matrone :

- Ah-Ah ! Qui oserait dire le contraire ?

La petite assemblée de chimistes répond en cœur :

- Pas moi, non, non.

Ils jouent les victimes apeurées, s'amusent encore ainsi quelques minutes, puis regagnent leur poste de travail.

 

Tous ces événements ont retardé Joséphine. Mais quelle journée tout de même ! "Il y en a des comme ça", pense-t-elle. Notre amie allume sa flamme, bien décidée à donner un grand coup. Elle prépare ses boîtes, les marque et les range, chacune à sa place. Elle ferme la porte pour éviter les courants d'air, car ceux-ci nuisent à la stérilité indispensable aux manipulations qu'elle entreprend. Elle règle son tabouret à la bonne hauteur pour son confort et par respect pour son dos. Elle s'assied. On frappe à la porte. Qui est-ce encore ?

- Entrez !

La voix de la laborantine est nette et tranchante. Plus question de badiner. Il faut finir la journée. La porte s'ouvre, mais Joséphine n'entend aucun pas, aucun son, pas un souffle. Intriguée, elle se retourne. Tout penaud, Aldo est planté devant la porte. Il esquisse un sourire. Le ton de la technicienne s'adoucit. Elle devient taquine tout en conservant une note de reproche :

- Ah, c'est vous ! Vous existez toujours ! J'étais sur le point de vous retirer de ma mémoire.

- Quelle peine cela me ferait ! M'oublier, moi ! J'en aurais le cœur fendu.

- Alors, expliquez-moi Don Juan pourquoi vous vous faites si rare ?

- C'est que ton chef garde cette porte jalousement ! Les harems de Ryad sont moins bien gardés. Il n'y a plus moyen d'approcher l'antre sacré. J'ai dû, déesse, profiter de l'absence de la garde pour m'introduire clandestinement jusqu'ici et j'ose à peine lever les yeux sur votre précieuse personne.

Joséphine éclate joyeusement :

- Vue sous cet angle, la situation peut devenir intéressante. Dans le pays d'Alice aux merveilles, vous seriez un irrésistible prince charmant.

- De quoi aurait l'air ton chef ?

- Lui, on pourrait ne pas le mettre dans l'histoire.

- Bonne solution ! Idée réjouissante... Dis, je suis bien content de te voir : ça ne va pas !

Joséphine s'inquiète :

- Quoi ?

- Les résultats ! C'est la foire.

- Mais je n'ai absolument rien changé à ma façon de travailler !

- Calme toi, je ne parle pas de la bactério.

Il fait un signe de tête vers la chimie :

- c'est là que ça ne va pas. Le pharmacien vient de me dire que l'on modifie le programme informatique et que ça crée des perturbations.

- Il ne rit pas non plus. Tout à l'heure, il était même très fâché. Quant à Fifi, elle était rouge. Leur déontologie ne leur permet pas de critiquer le chef, mais ils sont au bord de la révolution qu'ils ne feront pas bien sûr. Ils sont de braves petits moutons. C'est à vous les médecins, vous les clients, de manifester votre mécontentement.

- Je téléphone plusieurs fois par semaine à Coupdevent. Crois-moi, je ne le ménage pas. Il me donne des explications énormes, ses promesses sont fermes, mais rien ne change. En plus, il se permet de porter des jugements sur mes diagnostics.

- Ce n'est pas vrai ?

- Si, à propos de l'angine de la grande qui travaille en hémato... Dupont...

- Marie ? Je m'en souviens. Elle avait du strepto A dans son frottis de gorge.

- C'est ça. Je lui avais prescrit une cure d'antibiotiques et je lui ai mis quatre jours de repos. Il m'a dit : "Ce n'est pas nécessaire de me priver d'une laborantine pour du strepto A." Je connais tout de même mon métier et je suis bien capable de juger de l'état d'une gorge !

- Je m'en souviens. Il était furieux. J'ai d'ailleurs eu une discussion houleuse avec lui à ce sujet. Je ne pensais pas qu'il aurait l'audace de vous faire une remarque. Il dépasse les bornes !

- J'ai bien envie de me trouver un autre laboratoire.

- C'est ça ! Et nous, qu'est-ce que nous devenons là-dedans ?

- Tu n'as qu'à changer aussi. Je pourrais t'appuyer. Choisis ton laboratoire, j'y proposerai ma clientèle et le tour sera joué.

- Merci de la proposition, mais je ne vais pas quitter ce cher service que, jour après jour, j'ai amené là où il est. Et Ailleurs, est-ce que c'est mieux qu'ici ? Où aller ?

- Il est vrai que dans la région, il n'y a pas grand chose de valable. C'est d'ailleurs pour cela que je travaille encore avec vous. De tous les maux, il faut savoir choisir le moindre. Toi, tu devrais t'en aller dans un laboratoire universitaire.

- à Bruxelles ? Regardez : En face, il y a des arbres, des oiseaux. À côté, des moutons, des vaches. Que ferais-je dans une grande ville ?

- Pourquoi pas à XXX ? Je connais du monde. Si tu veux, je t'aiderai.

- C'est très gentil. Je vous remercie. Plus tard, peut-être, si la situation ne s'améliore pas ici. Après tout, ici, c'est chez moi.

- Tu as raison. Patientons ! Ici, c'est sur place.

Il regarde les boîtes étalées sur la table. Il hésite. Après un court instant de silence, contre toute attente, il demande : As-tu déjà isolé du listéria ?

- Oui, c'était chez un prématuré. Il y en avait partout : dans le sang, le liquide gastrique, le liquide céphalo-rachidien, sur la peau. Le germe pullulait également dans le placenta et le liquide amniotique. L'enfant est mort peu après sa naissance. Le docteur Mirande a longuement essayé de le sauver. C'était impossible ! Il était trop tard.

- Est-ce que tu en trouve souvent ?

- Non. Il faut dire qu'en dehors des patients affaiblis, il est surtout dangereux en cas de grossesse. Le meilleur moyen de l'isoler est de prélever des hémocultures au moment des frissons, mais la fièvre n'est pas très importante. Elle peut même passer inaperçue. Le germe passe la barrière placentaire. Du sang de la mère, il contamine le fœtus et provoque ainsi l'avortement. Et même des avortements à répétition.

- Mais alors, il faudrait le chercher chez toutes les femmes enceintes ?

- En cas de frissons, absolument. Dans le vagin, je le cherche systématiquement, mais je n'en ai jamais isolé à ce niveau. Il est cependant regrettable que l'examen bactériologique soit trop souvent négligé en cas de grossesse. Je suis souvent étonnée de constater que les gynécologues sont rarement sensibles aux risques bactériologiques de la gestation et de l'accouchement. A l'occasion du cas dont je viens de vous parler, j'ai été ahurie par l'ignorance des deux accoucheurs de l'hôpital. Ils n'avaient entrepris aucun traitement au niveau de la mère après la mort du bébé. Il est vrai que le germe n'est pas très dangereux pour la femme elle-même. Mais le risque de fausses couches et de morts nés est trop important que pour être négligé.

Une main délicate frappe à la porte.

Joséphine, d'un air blasé :

- Entrez !

La laborantine regarde la porte par-dessus ses lunettes. Aldo, amusé par ses mimiques, tourne également la tête. La porte s'ouvre et Rémy paraît, un peu coquin, un peu humble. Les trois visages s'éclairent : La compagnie sera bonne.

Aldo s'adresse à Rémy :

- Alors, vieux, tu viens courtiser ?

- Je ne voudrais pas prendre ta place.

- Je t'en prie ! Elle ne veut pas de moi. Tu te rends compte : malgré toutes mes qualités !

- C'est, en effet, incompréhensible.

Les bras croisés, Joséphine est appuyée à la table. Elle suit la conversation d'un air médusé.

Aldo continue :

- Avec les intellectuelles, c'est toujours pareil ! On fait le beau, elles ne voient rien.

- Je les aime assez. Il faut dire que mon physique ne me permet pas tes exploits. Je dois raffiner les jeux de la séduction.

- Je pense que tu devrais m'initier à tes méthodes.

- Pour que tu me coupes l'herbe sous le pied !

Joséphine à Rémy :

- Il ne faut pas le craindre. Ses discours manquent de persuasion.

Rémy éclate de rire :

- Voilà qui me réjouit.

Taquin, Aldo lui rétorque :

- Tranquillise-toi, vieux ! Je te laisse l'avantage.

Plus sérieux, il continue :

- Je suppose que toi aussi, tu profite de l'absence de son chef pour venir courtiser la bactériologiste. A moins que ce ne soit ses microbes qui t'intéressent ?

- On ne peut décidément rien te cacher ! Je les collectionne secrètement. Malheureusement, le chef de cette demoiselle perturbe mes plans.

- Tu vas pouvoir donner un grand coup à tes projets, car la blonde autorité est absente pour le reste de la journée.

- Quelle aubaine !

- Profites-en, si tu peux. Il faut que je me sauve. J'ai encore beaucoup de travail. A propos, t'es-tu inscrit à la conférence-bouffe-beuverie organisée par la firme Axphar ?

- Non, le sujet ne m'intéresse pas.

- Moi non plus ! Peut-on d'ailleurs appeler ça un sujet ? ça ressemble plus à de la publicité engraissante.

Tous éclatent de rire.

Aldo se tourne vers Joséphine et la salue en inclinant profondément le buste :

- Déesse, au plaisir de vous revoir !

En riant, la laborantine le congédie d'un geste de la main :

- également, cher Docteur !

 

Rémy est maintenant seul avec elle. Il est souriant :

- Notre ami commun tient la forme aujourd'hui !

Joséphine, sentencieuse :

- Il n'est jamais sérieux !

Moins sévère, elle s'attendrit :

- Mais il est très agréable. Il a l'art d'introduire de grosses plaisanteries dans des conversations sérieuses sans les dénaturer. Je pense que c'est sa façon de conjurer les situations difficiles. Ses visites sont toujours une occasion de détente.

- Vous en avez besoin ?

- Et comment !

- La vie ne doit pas être facile tous les jours ici ?

- ça dépend de l'attitude que l'on a vis à vis du nouveau chef. Ceux qui approuvent l'orientation qu'il donne au laboratoire ou qui font semblant sont très bien traités.

- Ce n'est certainement pas votre cas.

- eh non ! Je n'approuve pas. Pis encore, je résiste !

- Ne changez surtout pas votre travail ! Nous sommes nombreux à l'apprécier.

- Merci... C'est difficile... D'autant plus que les visites amicales se font rares. Pourquoi ? J'ai pourtant bien besoin d'encouragement !

- C'est que la porte est bien gardée !

- Il paraît. Pourtant, vous, les médecins, les clients, vous êtes tout de même suffisamment puissants pour vous faire respecter !

- Il aurait été inconvenant de notre part de ne pas prendre en considération ce nouveau confrère qui s'installait. Personnellement, je ne voulais pas l'offenser, d'autant plus que je ne le connaissais pas.

- Et maintenant, vous le connaissez ?

- Suffisamment pour ne plus me gêner à son égard.

Joséphine est pensive. Elle n'ose pas encore se réjouir. Sur un ton badin elle ose cependant une toute petite avancée :

- Cela signifierait-il que je vais avoir le plaisir de vous voir plus souvent ?

- Je vous le garantis.

- Je me sens déjà mieux.

Elle se frotte les mains en signe de satisfaction. Cela ne vaut pas un tendre discours. La situation ne s'y prête d'ailleurs pas. C'est sa façon à elle !

Rayonnante, elle poursuit :

- Alors, racontez-moi, comment allez-vous ?

- Mal. Je suis sorti à Liège hier soir. Je manque de sommeil.

- Est-ce bien sérieux, Monsieur le Docteur de perdre des heures précieuses à s'amuser ?

- C'est nécessaire. Il faut de temps en temps se détendre, sans quoi, on devient gâteux.

Parfaite comédienne, elle joue la terrifiée :

- Vous croyez que cela risque de vous arriver ?

- Je m'en garde de mon mieux. Et vous ? Toujours autant de travail ?

- Toujours plus ! Mais je vais avoir de l'aide. Irénée commence ici demain.

Il fronce les sourcils et interroge :

- Irénée ? Qui est-ce ?

- La brune toute frisée qui vous prépare du matériel de prélèvement quand vous en demandez.

- Ah oui ! Elle est très gentille.

- Pour ça, oui !

- Mais sait-elle travailler en bactério ?

- Je lui apprendrai.

- Vous ne serez plus seule... Je ne pourrai plus venir parler avec vous.

Son expression est devenue boudeuse. Pauvre enfant contrarié ! Joséphine s'amuse. Elle conserve son optimisme :

- Pourquoi pas ?

- Vous me voyez élaborer des théories sur les rats des villes et les rats des champs devant votre collègue ?

- Elle sera certainement charmée de vous entendre.

- Ou elle me prendra pour un fou !

- Personne n'oserait penser du mal de vous devant moi.

- J'en suis flatté, mais ne croyez-vous pas qu'elle puisse penser à votre insu ?

Il est devenu tout à fait taquin, alors que Joséphine continue très sérieusement :

- Vous seriez bien étonné de savoir à quel point tout le monde vous aime bien ici.

- Arrêter, vous allez me mettre mal à l'aise.

Il se rapproche d'elle et lui chuchote en confidence :

- Je suis très timide, mais il ne faut pas que cela se sache.

- Oh ! Mais cher ami, ce n'est un secret pour personne ! Ne faites donc pas autant de façon. N'oubliez pas que chaque fois que vous passez, vous êtes le bienvenu. En plus, tant que la formation d'Irénée se poursuivra, je terminerai mes journées toujours aussi tard.

De l'index pointé, elle insiste sur les paroles suivantes qu'elle articule lentement :

- Et dans la soirée, je serai seule.

- Dans ces conditions !

Il regarde sa montre et prend un air de catastrophe :

- Il faut que je me sauve. J'avais un rendez-vous il y a dix minutes. à bientôt, alors.

- à bientôt, j'espère.

Il a déjà posé une main sur la poignée de la porte pour l'ouvrir. Il hésite, puis se ravise avec fermeté :

- Vous aussi, vous pouvez passer chez moi !

Prise au dépourvu, Joséphine n'en est que plus sincère :

- Je n'oserais pas.

- Pourquoi ?

- J'aimerais bien, mais...

Il est déjà parti. La laborantine est troublée. Son cœur se gonfle et se crispe à la fois. Mais déjà, il sautille. La vie est belle. Vite au travail pour enfin finir cette journée.

 

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